Dans la peau d’un « Martyr »

Une scène surréaliste de "Martyr" où le personnage à l'origine du conflit (masqué au centre) oppose sa professeur de biologie et le proviseur de son lycée. Crédits Photo : Jean-Louis Fernandez

Une scène surréaliste de « Martyr » du conflit qui oppose la professeur de biologie du jeune Benjamin (à gauche) et le proviseur du lycée (à droite), à propos de la crise mystique du lycéen (masqué, au centre). Crédits Photo : Jean-Louis Fernandez

Avec « Martyr », le dramaturge allemand Marius von Mayenburg pose la question tristement actuelle de l’extrémisme religieux. A travers Benjamin, il montre comment un jeune adulte peut glisser peu à peu dans la radicalisation mystique. Mise en scène par Matthieu Roy, de la compagnie du Veilleur, la pièce, publiée en 2012, se joue jusqu’au dimanche 23 novembre au théâtre Gérard Philippe de Saint Denis.

Sur la scène ultra sobre trône un autel tantôt lit, tantôt table ou tribune. Le son déborde, amplifiant la voix des comédiens, la décuplant parfois en un long écho, brouillant les pistes de l’ordre auditif habituel. Huit acteurs évoluent dans une multitude de tableaux menés tambour battant. Le texte très fort se déploie comme un long fleuve ininterrompu.

Petit-à-petit Benjamin bascule vers l’idéologie religieuse, sa pensée s’emballe défiant le bon sens, la raison, frisant la folie. Il ne se déplace désormais plus sans sa Bible dont il lit constamment des bribes à qui veut l’entendre.

Autour de lui, sept personnages : sa mère, le proviseur, le prêtre, un ami, la fille sexy, son professeur de natation et sa professeur de biologie, madame Roth, la seule à s’opposer à lui avec conviction.

L’auteur soulève le thème de l’identité des jeunes et leur difficile construction face à un monde complexe en perte de valeurs, à leur âge très influençable.
Il montre les limites de chacun face à la dérive de l’extrémisme religieux. Celles aussi des institutions ; l’église, insistante à vouloir récupérer Benjamin, le professeur de natation, qui utilise l’humour pour mieux botter en touche, le proviseur dépassé qui campe sur des positions classiques, jusqu’à renvoyer la courageuse madame Roth, impuissante.

Dans « Martyr », le traitement cinématographique n’est jamais très loin, notamment dans la scène de la table ronde où le proviseur convoque les différentes parties prenantes, qui brille d’une remarquable lumière blanche sculpturale, surnaturelle de froideur.

On notera que l’auteur n’a pas fait le choix de l’effusion de sang ni des armes mais s’est focalisé sur la violente puissance des mots et des idées et le choc des idéologies dans le quotidien d’un jeune homme pour aborder le glissement progressif  vers l’extrémisme.

Isabelle Artus

Site du théâtre Gérard Philippe
Site de la compagnie du Veilleur

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