Les 20 et 21 septembre 2014, le journal Le Monde conviait le public à la première édition du Monde festival « Le monde de demain, parlons-en aujourd’hui », aux opéras Garnier et Bastille. L’évènement coïncidait avec les 70 ans d’existence du quotidien. Une centaine de grandes personnalités ont exposé leurs visions de notre monde en devenir, ses enjeux, ses limites et ses dangers, lors de trente rencontres et débats.
Ces invités prestigieux étaient issus d’univers très différents : des idées, de la culture, de la société, de l’économie, de la politique, des sciences et de l’éducation, du sport et du « lifestyle ». Citons par exemple Daniel Barenboim, chef d’orchestre, Akhenaton, rappeur-producteur, Jacques Antoine Granjon, PDG de Vente-Privée.com, Mikhail Khodorovski, oligarque et ancien prisonnier politique, Christiane Taubira, ministre de la Justice, Carlo Petrini, directeur de Slow food, Edgard Morin, sociologue et philosophe, Cédric Villani, mathématicien, rarement autant de témoins de notre époque n’avaient étés réunis.
Je m’arrêterais sur la table-ronde « L’innovation, facteur de progrès social ? » animée par Annie Kahn. Elle rassemblait Hélène Langevin, physicienne, petite fille de Pierre et Marie Curie, Dominique Méda, philosophe et sociologue du travail, Cédric Villani, mathématicien et vulgarisateur sans pareil, Laurent Alexandre, directeur de DNA Vision, une société de séquençage d’ADN et « l’électricien » Bernard Salha, directeur d’EDF R&D.
Les démonstrations de Laurent Alexandre ont transporté l’assistance dans un monde digne de productions de science fiction, celui des bouleversements que connaitra l’humanité avec l’avancement des NBIC, les nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives, prédit-il, en affirmant que nous y sommes déjà et vivons actuellement une biorévolution.
Bricoler le vivant
A-t’on remarqué aujourd’hui notre capacité à « bricoler le vivant », questionne le scientifique ?
De moins en moins d’enfants appelés hier -très maladroitement- « anormaux » naissent de nos jours, précise-il, le diagnostic prénatal ayant profondément progressé. Des handicaps comme la trisomie 21 auront sûrement disparu sous peu et nous ne mourons bientôt plus du cancer, selon lui.
« Qui ne rêve pas que son enfant naisse avec un QI supérieur à la moyenne ? », lance Laurent Alexandre en affirmant que sera possible demain, que les futures générations seront bien plus intelligentes. Aujourd’hui, on pose déjà des implants aux déficients auditifs pour améliorer leur performance, alors …
Cet énorme potentiel de transformation du vivant pose des questions graves car il s’agit de méthodes d’intervention sur le patrimoine génétique de l’ humanité.
Nous dirigeons-nous vers la constitution d’une espèce humaine « idéale » ?
Jusqu’où peut-on manipuler le vivant ?
Ces débats éthiques, moraux, philosophiques, politiques, majeurs, concernent tout citoyen mais existent malheureusement peu sur la place publique, tout comme dans les plus hautes sphères décisionnelles, ajoute le scientifique.
Les neuro-technologies contrôlées par GAFA
L’ancien chirurgien et urologue Laurent Alexandre explique ensuite avec véhémence combien GAFA, Google, Apple, Facebook et Amazon, prennent peu à peu le contrôle des neuro-technologies. Les NBIC,-nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives-, sont aujourd’hui contrôlées par Google : les neurones pour les sciences cognitives, les atomes pour les nanotechnologies, les bits pour l’informatique et les gènes pour la biotechnologie.
Sur le plan du travail, Laurent Alexandre prévoit l’automatisation des métiers intellectuels dans 30, 40 ans. Elle sera redoutable, affirme t-il. De quoi donner froid dans le dos.
Isabelle Artus
VIDEOS
Sur l’intelligence artificielle : Laurent Alexandre, invité de USI, Unexpected Sources of Inspiration
Sur l’immortalité : Laurent Alexandre, invité de la conférence américaine TED
Merci pour ce rappel…à méditer. Leila